COVID-19 : Réflexions sur les opérations en clinique médicale en période de crise

Annie Blanchette, vice-présidente de Bonjour-santé et gestionnaire du GMF-R Polyclinique Levasseur, partage ses réflexions et observations en ce qui a trait aux opérations en clinique médicale en période de pandémie COVID-19.

COVID-19 et la transformation des opérations en clinique

Qui suis-je? 

Je gère le GMF-R Polyclinique Levasseur à Montréal depuis 2014. Jusqu’ici, au-delà de la gestion des consultations et l’amélioration continue des soins, nos journées portaient en partie sur l’administration des programmes GMF et GMF-R ainsi que sur le recrutement des médecins. Ces défis, qui nous semblaient réalisables au quotidien, me semblent aujourd’hui bien loin. 

Avec le contexte actuel, j’ai pensé coucher mes pensées sur papier et vous partager mes réflexions sur les opérations en clinique en période de COVID-19, et comment la situation actuelle influencera la suite des choses une fois que nous aurons accompli un quelconque retour à la normale.

Réorganisation et adaptation depuis le 13 mars 

Depuis que l’état d’urgence sanitaire a été déclaré sur tout le territoire québécois le 13 mars dernier, nos opérations ont grandement changé. Outre la logistique qui a dû être complètement revue, nous avons été témoins de l’apparition d’un éventail d’émotions à la clinique. À noter d’abord le courage admirable de notre personnel, malgré son anxiété face à la situation; son angoisse quant à l’état de santé de son équipe et de ses patients; et le stress lié à la course à l’information, au protocole à suivre ainsi qu’au chamboulement de tous les horaires alors que les patients ne veulent plus, avec raison, se déplacer en clinique et annulent leurs rendez-vous.

Comme plusieurs le savent, la Polyclinique Levasseur utilise depuis ses débuts 100 % des technologies Bonjour-santé. Au moment où se déclarait la pandémie, nous avons pu réagir rapidement en intégrant les outils de téléconsultation développés par Bonjour-santé à nos solutions de gestion des rendez-vous. Chez Bonjour-santé, nous avions développé la technologie de téléconsultation avant l’éclosion de la COVID-19 et l’avions recommandée à notre équipe médicale.Toutefois, nous ressentions une certaine résistance de sa part à en faire usage, ce qui est tout à fait normal puisque l’adoption de nouvelles technologies entraîne inévitablement une gestion du changement. Dans le contexte de la crise actuelle, nous témoignons cependant d’une grande résilience et d’une force d’adaptation exceptionnelle de la part de notre équipe, ce qui nous permet de moduler nos façons de faire rapidement et efficacement. Jusqu’ici, nous avons abordé trois grandes vagues de changement.

1re vague : Transformer les rendez-vous en clinique en rendez-vous par téléconsultation

La première vague de changement, qui me semble dater de plusieurs mois alors qu’en réalité elle a pris naissance il y a quelques jours seulement, a été de transformer les rendez-vous en clinique prévus à l’horaire des médecins en rendez-vous tenus en téléconsultation par visioconférence ou par téléphone. Notre équipe a dû communiquer avec les patients pour leur expliquer ce changement et leur recommander de rester à la maison. Alors que certains patients ont admis ressentir de l’anxiété, plusieurs ont bien accueilli cette solution de rechange. 

Heureusement, comme les médecins de la Polyclinique Levasseur travaillent déjà en accès adapté, des rendez-vous remplissaient leur horaire pour les deux prochaines semaines seulement. En conséquence, la conversion des rendez-vous en téléconsultations s’est bien déroulée. Après avoir installé des caméras web dans les bureaux, créé pour les médecins des comptes d’accès à la plateforme de communication et accompagné ces derniers dans leurs premières rencontres virtuelles, notre équipe médicale est maintenant en mesure de « voir » un grand nombre de patients tout en évitant les déplacements en clinique. Conclusion : tant nos médecins que nos patients se disent très heureux d’adopter cette technologie qui leur permet de protéger leur santé.

2e vague : Assurer le suivi des résultats de laboratoire et des examens diagnostiques

La deuxième vague a été de réviser toutes les demandes des médecins qui convergent habituellement vers le secrétariat pour l’attribution des rendez-vous de suivi des résultats de laboratoire et d’examens diagnostiques. Bien entendu, depuis que la téléconsultation est rémunérée par la RAMQ, les médecins sont beaucoup plus enclins à faire ce type de suivis par téléconsultation. 

Si comme nous, vous avez vu le volume de patients en clinique chuter dramatiquement, vous savez qu’il est essentiel de trouver des moyens de combler les horaires des médecins afin d’assurer les revenus de nos médecins et bien entendu, les revenus de la clinique. Pour nous, la téléconsultation se révèle essentielle.

Il va sans dire que le travail de notre secrétariat et de nos infirmières vit un bouleversement important avec la téléconsultation mais notre équipe s’ajuste fort bien à ce remaniement des opérations. À titre d’exemple :

  • Le volume de patients présents à la clinique étant relativement plus bas qu’à l’habitude, le travail de secrétariat en ce qui a trait à l’accueil des patients a donc diminué proportionnellement. En revanche, l’envoi des documents requis par les médecins qui font de la téléconsultation connaît une hausse fulgurante; il faut donc que l’équipe se réorganise pour veiller à ce que les documents soient bien acheminés aux patients.
  • Nous avons dû créer des équipes de travail entre médecins et infirmières cliniciennes pour la signature des formulaires requis et des prescriptions en vue de les transmettre par télécopieur aux pharmacies ou aux patients.
  • Plusieurs autres exemples s’ajoutent à ceux suscités. Alors que nous naviguons de grands changements, nous devons constamment tenir compte des rôles et des responsabilités de chacun et être prêts à les façonner afin qu’ils répondent adéquatement aux besoins actuels.

3e vague : S’assurer que nos médecins puissent offrir des soins et ainsi assurer la pérennité des opérations de notre clinique

Ce que j’anticipe aujourd’hui est que nos médecins, habitués de traiter avec des horaires débordants et des manques de disponibilités, seront confrontés à des horaires beaucoup plus vides alors que nous entamons la courbe d’apprentissage requise pour éduquer 8,5 millions de Québécois sur le fonctionnement et les avantages de la téléconsultation.

Cette semaine, nous aborderons donc avec notre équipe médicale un changement complet du paradigme de l’offre de rendez-vous et l’inciterons à passer en mode prévention. Ainsi, pour l’instant, l’objectif sera de combler les horaires avec des rendez-vous de prévention, tels que des consultations avec des patients vulnérables ou des patients diabétiques qui n’ont pas eu de consultation depuis plus de six mois.

Tout comme la situation COVID-19 change rapidement, nous restons vigilants et prêts à changer en conséquence, nous aussi. C’est donc dire que bien que l’approche de la semaine portera sur la prévention, nous pourrions migrer vers une approche différente dans les semaines à venir. 

Comme toute la population, nous suivons la courbe d’apprentissage.

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